Personal Statement

« Raconter une histoire de fantômes, c’est accepter d’être hanté. »

Judith "Jack" Halberstam

 

 

 

Mon travail est le résultat d’une enquête de deux ans sur l’identité queer. L’identité n’est pas une notion tangible et de ce fait elle peut être difficile à définir. Mes œuvres ont un caractère fantomatique et étrange. Comme l’a suggéré Halberstam, l’histoire queer a longtemps été cachée, et basée sur la honte, la frustration et la culpabilité. Grâce à des projets tels que Gay Loneliness et Between Reality and Fantasy, j’ai remis en question la nature même du fait d’être queer. Mon objectif était de trouver une méthodologie qui implique de sélectionner des artefacts existants qui avaient le potentiel d'être interprétés comme queer. Les critères de sélection étaient que les objets devaient avoir un fort caractère esthétique et évoquer le genre, la sexualité, la masculinité/féminité ou une identité gay. J'ai utilisé différents pipelines créés par l’industrie des effets spéciaux. Par exemple, la modélisation, la texturation et l'éclairage. Au cours d’un processus de modification et d’ajout, mais aussi de superposition de différents matériaux numériques, ces images sont apparues comme des fragments d’une histoire lointaine, qui finalement sont progressivement devenus une partie de ma propre identité.

 Historiquement, depuis le début des années 1930, les chercheurs ont écrit sur une « identité gay ». Après la révolution gay des années 70 et la crise du VIH dans les années 80, les études queer ont émergé, suivies par les théories queer. Cependant, les concepts moderne et postmoderne diffèrent par l'utilisation de terminologies et de concepts idéologiques spécifiques fondamentalement différents. Par exemple, la pensée « positiviste » de Simone de Beauvoir était assez différente de celle des postmodernistes féministes. En effet, pour un moderniste, les connaissances se situent dans le monde de la forme, en tant que domaine distinct de la connaissance, à partir duquel nous devrions apprendre.  Et c’est précisément parce que Judith Butler a une approche empirique sur sa pensée, que l’on peut la différencier d’autres chercheurs modernistes. Aujourd’hui, nous vivons dans un cadre normatif queer que certains appellent homonormativité. Par exemple, RuPaul, juge de téléréalité de  RuPaul Drag Race, est en grande partie le produit de cette évolution queer. RuPaul a trouvé une plateforme pour vulgariser les études queer et théoriques avec un langage visuel très facile à comprendre. Inspiré par les études et la théorie queer, j'ai produit trois séries d'images : Duality of Power and SexualityThe Queer UncannySissy That Walk.

Selon moi, La mimesis est un moyen puissant d’illustrer les changements idéologiques historiques. Platon considérait la mimesis comme un art reflétant le monde tel qu'il est. Un miroir, tourné vers le monde. Erich Auerbach, dans Mimesis : The Representation of Reality in Western Literature, considérait l’art comme un « hétérocosme » (un monde alternatif) qui simule notre monde familier. Selon Auerbach, la mimesis n’implique pas l’imitation d’un « monde réel », elle en offre donc seulement une simulation convaincante du « réel ». C’est comme un miroir implicitement tourné vers le spectateur et ses croyances. Une décision consciente a été prise pour renforcer le photoréalisme de ces images afin que le public puisse croire que ces artefacts existaient réellement. J'ai également imité les techniques que les archéologues utilisent pour présenter les œuvres historiques : des dessins, des rayons X et des installations muséales.

 

En art, de manière souvent assez subtile, des artistes et intellectuels queer ont popularisé ce sujet. Par exemple, Laurence Anyways de Xavier Dolan, Kid d'Eddy de Pretto, How Do You Sleep ? de Sam Smith. Mon travail s’inscrit dans un besoin contemporain d’exprimer cette condition d’être différent. Il y a quelques artistes qui m'ont inspiré : Andy Lomas, qui utilise des images de synthèse pour créer des rendus moléculaires d'un autre monde, et dont le travail Cellular Forms a remporté le Lumen Prize Gold Award. David Maisel, dont l'exposition History's Shadow présente des photographies aux rayons X d'objets historiques. Quayola, un artiste italien qui a suivi une formation de sculpteur sur pierre et a imprégné son travail de sa formation d’art académique. Il a aussi utilisé des scans 3D et des impressions 3D.

 

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